Comment positionner votre propre discours ?

Sommaire général
Remarques préliminaires
Module 1 : Quel type de rapport allez-vous produire ?
Module 2 : Comment présenter votre rapport ?
Module 3 : Comment situer vos idées et celles des autres ?
Remarques préliminaires
La relation entre auteur et destinataires
D'où viennent nos idées ?
Dialogue avec vos prédécesseurs et caractère polyphonique des textes
Les citations pour s'appuyer sur une autorité et développer des idées nouvelles
Comment positionner votre propre discours ?
Les notes, leur relation aux citations, comment les rédiger et où les mettre ?
Module 4 : Comment structurer votre rapport ?
Module 5 : Comment faire pour qu'un texte soit cohérent et dynamique ?
Module 6 : La bibliographie
Module 7 : Table des matières, Annexes, illustrations et légendes, index

 

 

Les trois modalités fondamentales

Il y a plusieurs façons de présenter son discours. Si l'on est certain de ce que l'on avance, on peut affirmer, manifester une attitude affirmative. Si l'on est hésitant, on peut poser des questions, chercher une réponse, prendre une attitude interrogative. On peut également choisir de présenter les choses ou de résoudre les problèmes sous forme d'injonction (ordre, demande, souhait). On a là trois attitudes fondamentales : constater (asserter), questionner (poser ou se poser des questions) ou encore donner des ordres de manière plus ou moins forte. Ces différentes attitudes sont nommées "modalités" par les linguistes.

 

Voici quelques exemples simples pour illustrer ces trois modalités :

1. assertion : La date limite de candidature est dans 20 jours.
2. interrogation : Est-ce que tu penses qu'elle se présentera ?
3. injonction : J'aimerais qu'elle finisse son stage.

Les textes et les discours utilisent ces diverses modalités de façon variable selon les circonstances et les intentions. Les textes des rapports abondent en assertions : on affirme des faits, on rapporte des observations, on donne un avis assuré. Mais il arrive aussi que l'on pose des questions (auxquelles on répondra plus loin.) Il arrive enfin que l'on formule des souhaits ou que l'on suggère des solutions.

Voici quelques exemples pris dans des rapports :

1. Une succession d'assertions relevées dans un rapport sur le financement des infrastructures de transport :

"Plusieurs années s'écoulent entre la décision de lancer un projet et sa mise en service effective. A titre d'exemple, l'inauguration du TGV Paris-Lyon, en 1981, a eu lieu dix ans après la décision de construction. Entre la concession et la mise en service d'une autoroute s'écoulent en moyenne sept ans. Encore ces délais ne prennent-ils pas en compte le temps nécessaire aux études et consultations préalables. Cette longue phase préliminaire, consacrée aux procédures administratives ou judiciaires (étude d'impact, enquête d'utilité publique, expropriation) et aux travaux de construction, constitue une lourde charge financière".

2. Un passage pris dans un rapport concernant la communication publique qui comporte une série d'interrogations :

"Quelle doit être la place de la communication dans l'institution publique ? Quelles sont les finalités et les différents registres ? Qui assume les tâches de communication ? Quel partage et quelle cohérence entre interne et externe ? Quelle est la mission du service ? Quelles sont les relations avec son environnement institutionnel ? La démarche du projet de service formalisée par le "groupe de modernisation" de la direction générale de l'administration et de la fonction publique mérite d'être, à cette occasion, rappelée dans ses principales étapes."... (Suivent les principales étapes en question.)

Cette façon de présenter les choses est parfois utilisée dans les rapports pour annoncer une série de questionnements auxquels on tentera de répondre dans les passages qui suivent. C'est également une manière pratique de décomposer en plusieurs parties une question générale pour ensuite ordonner les éléments de réponse.

3. Des injonctions, toujours à propos du financement des infrastructures de transport :

"L'État doit donc conduire une réflexion approfondie sur les besoins réels de la France en matière d'infrastructures, sur les choix qui doivent être retenus, sur l'harmonisation nécessaire pour l'instant insuffisante entre projets autoroutiers et ferroviaires. Au-delà de la sophistication des montages qui peuvent être proposés et retenus, les solutions adoptées en matière de financement des infrastructures de transport requièrent des décisions d'investissement claires et cohérentes. Cette réflexion sur les besoins et sur les choix d'investissement, qui n'entrait pas dans le cadre de notre mission, apparaît aujourd'hui plus que jamais nécessaire."

Ce type de formulation convient généralement bien aux conclusions, lorsqu'il s'agit de faire des propositions, des suggestions. Les procédés linguistiques que l'on peut mobiliser à cette fin sont variés : on notera ici l'utilisation du verbe "devoir", du verbe "requérir", de l'adjectif "nécessaire".


Les modalités secondaires

Se superposant aux modalités fondamentales que l'on vient de voir, il existe des modalités supplémentaires, qui affectent plus directement le contenu de ce qui est énoncé. Elles se subdivisent en deux grandes catégories.
Les premières portent sur la plus ou moins grande vérité que l'on attribue à ce que l'on dit : elles rassemblent un ensemble de formulations qui permettent de présenter un fait comme étant plus ou moins vrai ou vraisemblable, plus ou moins plausible, plus ou moins probable ou possible, plus ou moins certain.
La seconde catégorie de modalités secondaires permet des appréciations ou des évaluations plus ou moins positives que l'on attache à ce que l'on énonce : tel fait peut être jugé bon ou mauvais, important ou mineur, intéressant ou sans intérêt, juste ou injuste, agréable ou désagréable.

 

Voici quelques exemples pris dans la langue courante :

Il ne devrait pas tarder à venir.
Il y a de fortes chances que ce soit lui.
Je suis heureux que tu aies pu venir.
Tu ne trouves pas bizarre que l'on puisse dire des choses pareilles ?
Cette personne est franchement antipathique.

Et des exemples pris dans des rapports :

1 - Hypothèses et probabilités :

"La maîtrise d'ouvrage serait confiée à une structure ad hoc, dont la mission serait : la construction de l'infrastructure ; la location de l'ouvrage à la SNCF, qui assurerait l'exploitation ; la vente à terme à la SNCF. Cette structure, qui pourrait associer la SNCF et des organismes financiers, assurerait le financement de l'opération."

"A brève échéance, la Communauté ne devrait donc pas jouer un rôle prédominant en matière de financement des infrastructures. En revanche, elle pourrait favoriser le lancement de projets d'intérêt européen en recourant à des instruments variés."

On peut noter l'utilisation du conditionnel comme l'une des formes verbales permettant d'exprimer l'hypothèse. Et parmi ces verbes, on retiendra l'usage des verbes devoir et pouvoir, au conditionnel également.

2 - Appréciations diverses :

"L'importance déterminante du point précédent tient à ce qu'il est essentiel de communiquer ce que l'on est plus que ce que l'on voudrait être. La communication ne peut porter ses fruits que si elle est, entre autres choses, un révélateur de la réalité des situations. Il n'y a de communication durablement bonne qu'authentique. Sur le plan purement pratique, il est certainement inutile de présenter une image moderniste et performante d'une administration dont les usagers constatent tous les jours le caractère passéiste et paupérisé."

"Même si l'objet du présent rapport n'est évidemment pas de présenter les voies et moyens de régler les problèmes du civisme, de la démocratie et du service public, il est possible d'indiquer quelques pistes de réflexions quant à la recherche du nécessaire traitement de ces problèmes qui passe vraisemblablement par des actions en profondeur : sur le fonctionnement courant du service public il est certain, en effet, que l'image qui résulte de guichets encombrés ou délabrés est, de façon générale, particulièrement défavorable et pour l'essentiel contre-productive…"

"Les meilleurs instruments n'ont jamais rendu meilleure une communication fondamentalement mauvaise en ce qu'elle serait infidèle à la vocation et à la politique d'une institution. "

On voit apparaître dans ces exemples de nombreux adjectifs à valeur appréciative "déterminant, essentiel, bon, moderniste, performant, passéiste, authentique, encombré, délabré, défavorable, contre-productif, mauvais, infidèle", parfois renforcés par des adverbes "durablement bonne, certainement inutile, fondamentalement mauvaise" ; quelques noms "l'importance, la vocation" ; des expressions "action en profondeur, porter ses fruits" ; et des mots ou expressions qui en eux-mêmes sont porteurs de valeurs positives "civisme, démocratie, service public" ou négatives "problème, guichets délabrés".

 

 

 

 
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 12/12/02